Les transformations qui s’opèrent dans nos sociétés, accélérées par la crise sanitaire, entraînent une évolution structurelle des entreprises avec l’apparition de nouveaux enjeux : recruter les meilleurs talents, répondre aux aspirations et attentes des nouveaux entrants sur le marché du travail et, par finalité, garantir une relation client fluide et instantanée.
Un raisonnement transposable aux appareils d’Etat qui eux aussi sont confrontés à ces défis dans un contexte de tension autour de certains métiers stratégiques (ceux du numérique par exemple).
L’étude de Profil public Tour du monde des innovations RH le montre effectivement : les Etats se penchent sur ces enjeux pour se repositionner en tant qu’employeur et accroitre leur compétitivité par rapport au privé. L’Etat français n’y échappe pas d’ailleurs : attirer, recruter, fidéliser sont les maitres mots afin de garantir la continuité du service public à toutes les échelles.
Un constat partagé par Claire de Meixmoron, responsable Marque employeur chez Profil Public :
« Dans un contexte de guerre des talents entre institutions mais également vis-à-vis du secteur privé, le service public doit adapter ses méthodes de recrutement et de fidélisation des collaborateurs »
Plusieurs constats :
En premier lieu, un déficit d’attractivité des concours et donc du statut de fonctionnaire en lui-même, vérifiable par un nombre de candidats en forte décroissance (divisé par trois entre 1997 et 2018 selon Sigrid Berger, Fondatrice de Profil Public). C’est le fruit d’un certain désintérêt pour le mode de sélection, mais également pour l’intégration dans un corps de métier perçu comme étanche et ne garantissant pas facilement l’accès à la mobilité. Problématique majeure, c’est une véritable alerte lancée par l’arrivée des générations Y et Z sur le marché du travail pour lesquelles le CDI n’est plus la norme.
En second lieu, la rémunération. A l’heure du digital, des expertises pointues sont très recherchées et l’Etat apparait en position de désavantage notamment sur ces métiers en tension. De la grille indiciaire à des propositions pour des contractuels qui ne concurrencent pas toujours les salaires du privé : c’est un élément de poids qui peut faire pencher la balance.
Au sein même de la fonction publique, on constate une concurrence interministérielle qui peut freiner certains mécanismes de mobilité notamment. Les structures qui réussissent à recruter des compétences pointues ont la crainte de se les faire dérober par une autre.
Enfin, le sujet se pose sous un angle managérial dont les pratiques ne coïncident pas toujours avec les attentes des jeunes talents pour qui la flexibilité, l’autonomie et l’accompagnement priment. Les stéréotypes sur la verticalité et la rigidité persistent et forment un des freins majeurs à l’attractivité et la fidélisation dans la fonction publique.
Mais les lignes bougent et les initiatives se multiplient.
La réforme de 2019, dont les objectifs s’inscrivent dans le programme d’accélération de la transformation du service public, a ainsi redéfini les modes de recrutement traditionnels en créant un nouveau type de contrat dit « de projet » et en facilitant le recrutement de contractuels sur des postes stratégiques. Le lancement du programme Entrepreneur d’intérêt général (EIG), créé par la DINUM, s’inscrit dans cette démarche : on y recrute non pas sur des postes, mais sur des défis, en proposant des rémunérations compétitives, une innovation majeure à destination des potentiels contractuels.
La direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP), en lien avec les acteurs de l’innovation publique (DITP, DINUM, DIESE etc…), œuvre quant à elle au quotidien pour identifier et activer des leviers RH en matière de QVT, d’innovation managériale et de communication. L’ambition se centralise autour de la marque #Choisirleservicepublic, une identité personnalisée lancée en février 2022 par Amélie de Montchalin, qui s’accompagne de dynamiques de transformations concrètes : une refonte du site Place de l’emploi public (PEP) pour favoriser son ergonomie et sa visibilité ; la construction du programme « Talentueuses », un dispositif de coaching à destination des femmes de la fonction publique pour les accompagner dans le développement de leur carrière.
A cela ajoutons des actions concrètes pour alléger les process, à l’instar du référentiel de rémunération commandé par le Premier ministre en mars 2017 et expérimenté en 2019 qui permet de supprimer le visa du contrôle budgétaire ministériel au-dessous d’un certain seuil de rémunération pour les contractuels.
Si la dynamique d’évolution est bien en marche, elle nécessite néanmoins la mobilisation de nombreuses ressources, tant financières qu’humaines. C’est un long processus et les défis restant à relever sont encore importants.
La transformation efficace de la fonction publique doit s’accompagner d’une transition vers une nouvelle culture du service public fondée sur un autre modèle managérial et organisationnel. Ainsi, l’expérience collaborateur, enjeu actuel majeur, doit être placée au cœur des préoccupations et priorités managériales. Mais les managers ne pourront faire cette transformation que si l’ensemble du modèle évolue de façon cohérente et systémique.
Les initiatives locales sont nombreuses et diversifiées. La prochaine étape sera d’entamer un processus de coopération et de mutualisation des bonnes pratiques, puis l’animer, en décloisonnant les expérimentations à l’échelle interministérielle.
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